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Nun liebe Kinder…
Alors en pleine composition de l'album Mutter, Till choisit d'abord "Sandmann" comme titre au morceau qui sortira finalement sous le nom de "Mein Herz brennt" en 2001. Till propose dans son texte une version personnelle de la légende du marchand de sable que nous connaissons tous. Le texte de la démo (jouée en concert au Knaack Klub, en 2000, avant la sortie de l'album) met en scène un homme qui a tué le marchand de sable et volé son scalp pour duper les enfants. Le texte final est plus évasif et s'inscrit dans l'héritage de la littérature allemande, en étant inspiré de la version du marchand de sable que donne Ernst T. A. Hoffmann, un écrivain romantique et compositeur du début du XIXème siècle, dans sa nouvelle "Der Sandmann".
La personnage principal de cette nouvelle, Nathanaël, a été marqué dans son enfance par l'avocat Coppelius, qu'il identifie au marchand de sable et qu'il pense être l'assassin de son père. Dès lors, Hoffmann modifie le personnage du marchand de sable, qui terrorise les enfants plutôt que simplement les endormir. C'est ce renversement qui donne à Till l'idée d'écrire un texte où un monstre rend visite aux enfants sur le point de s'endormir, et extirpe de leurs paupières des larmes chaudes, pour ensuite se les injecter dans les veines.
La comparaison ne s'arrête pas là. Si Till occulte volontairement une grosse partie de l'histoire de la nouvelle de Hoffmann, il en récupère largement les champs lexicaux et les thèmes. Celui des yeux, puisque Nathanaël pense que Coppélius veut les lui voler. Celui du coeur également, lorsque Nathanaël tombe amoureux d'Olympia, une fille qui habite de l'autre côté de la rue, et lorsque ses amis la critiquent, et qu'il éprouve le besoin d'"égratigner sa poitrine" en la défendant. Le geste rappelle celui du monstre de Mein Herz brennt, qui s'arrache le cœur de la poitrine. Enfin quand Olympia (en fait un automate) est démembrée par ses créateurs, le cœur de Nathanaël brûle littéralement, jusqu'à le conduire à la folie puis à la mort. On comprend l'origine du vers de Till "Mon coeur brûle".
Les êtres maléfiques apparaissent également dans les deux textes, que ce soit les hiboux de Coppélius ou les "schwarze Feen". Les manigances de Coppélius, présenté comme un démon, sont souvent décrites comme "infernales" par Nathanaël. Par ailleurs, lorsque Olympia chante, Nathanaël l'associe à des "fantômes". Ces "fantômes" rappellent évidemment ceux de Mein Herz brennt qui s'immiscent dans les rêves des enfants comme Olympia le fait dans l'esprit de Nathanaël.
Till propose donc dans Mein Herz brennt une vision très personnelle du marchand de sable, narrateur du texte, largement inspirée du texte d'Hoffmann. Pour l'anecdote, Till semble s'être inspiré d'autres éléments de la culture allemande, comme "Das Sandmännchen" (Le petit marchand de sable), une émission allemande des années 1950 destinée aux enfants. Celle-ci commençait systématiquement par Nun, liebe Kinder, gebt fein Acht. Ich habe euch etwas mitgebracht
, expression très proche du refrain de Mein Herz brennt.
» Télécharger l'analyse complète de Mein Herz brennt (PDF)
Langue : VOVF
Nun liebe Kinder gebt fein Acht
Ich bin die Stimme aus dem Kissen
Ich hab euch etwas mitgebracht
Hab es aus meiner Brust gerissen
Mit diesem Herz hab ich die Macht
Die Augenlider zu erpressen
Ich singe bis der Tag erwacht
Ein heller Schein am Firmament
Mein Herz brennt
Sie kommen zu euch in der Nacht
Dämonen Geister schwarze Feen
Sie kriechen aus dem Kellerschacht
Und werden unter euer Bettzeug sehen
Nun liebe Kinder gebt fein Acht
Ich bin die Stimme aus dem Kissen
Ich hab euch etwas mitgebracht
Ein heller Schein am Firmament
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Sie kommen zu euch in der Nacht
Und stehlen eure kleinen heißen Tränen
Sie warten bis der Mond erwacht
Und drücken sie in meine kalten Venen
Nun liebe Kinder gebt fein Acht
Ich bin die Stimme aus dem Kissen
Ich singe bis der Tag erwacht
Ein heller Schein am Firmament
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz brennt
Mein Herz
Mein Herz brennt
Maintenant, chers enfants, faites bien attention
Je suis la voix de l'oreiller
Je vous ai apporté quelque chose
Je l'ai arraché de ma poitrine
Avec ce cœur, j'ai le pouvoir
D'extirper vos paupières
Je chante jusqu'au lever du jour
Une lumière vive au firmament
Mon cœur brûle
Ils viennent vers vous dans la nuit
Démons, fantômes, noires fées
Ils rampent hors de la cave
Et vont regarder sous vos draps
Maintenant, chers enfants, faites bien attention
Je suis la voix de l'oreiller
Je vous ai apporté quelque chose
Une lumière vive au firmament
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Ils viennent vers vous dans la nuit
Et volent vos petites larmes chaudes
Ils attendent jusqu'à ce que la lune se lève
Et les injectent dans mes veines froides
Maintenant, chers enfants, faites bien attention
Je suis la voix de l'oreiller
Je chante jusqu'au lever du jour
Une lumière vive au firmament
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur brûle
Mon cœur
Mon cœur brûle
Sven Helbiginterview
Nous avons eu l'opportunité de nous entretenir avec Sven Helbig, musicien qui collabore avec Rammstein depuis quelques années. C'est lui qui a arrangé la version piano de Mein Herz brennt. Nous tenons à le remercier chaleureusement !
Le groupe sait toujours exactement ce qu'il veut et ce qu'il ne veut pas.
Je voulais enlever tous les aspects effrayants de la chanson pour vous faire ressentir toute la nostalgie et le désespoir de Till.
Je ne me lasse pas de Till dans la vidéo. Je suis vraiment surpris de son impact émotionnel.
- Bonjour Sven ! Comment allez-vous ? Pourriez-vous vous présenter aux fans de Rammstein qui ne vous connaissent peut-être pas ?
- Je suis compositeur. J'écris principalement de la musique orchestrale. Mon premier album solo sortira l'année prochaine, en février. Il s'appelle Pocket Symphonies.
- Vous avez travaillé sur les trois derniers albums studio de Rammstein. En quoi consiste précisément votre travail auprès du groupe ?
- J'ajoute juste des instruments supplémentaires ici et là. Le groupe sait toujours exactement ce qu'il veut et ce qu'il ne veut pas. Je n'ajoute pas grand chose, mais trouver les petits éléments qui fonctionnent bien avec la chanson prend du temps. L'effort est beaucoup plus intense que ce que les cinq notes que vous entendez peuvent suggérer.
Par exemple, pour le yodel sur Roter Sand, j'ai du marcher plusieurs jours dans les Appenzell [une région montagneuse, ndlr] en Suisse jusqu'à ce que je trouve un vieux grand-père de 92 ans, encore capable de faire ce vieux et triste yodel. Il m'a emmené à son étable et a commencé à yodler pour moi. Je l'ai enregistré. Vous pouvez l'entendre sur la version orchestrale de Roter Sand sur Liebe ist für alle da.
- Sven, racontez-nous l'histoire de cette nouvelle version de Mein Herz brennt. Quels étaient les objectifs du groupe au départ ?
- Le groupe voulait avoir un remix au piano. J'ai déjà fait deux remix pour eux avant. Mann gegen Mann [Musensohn remix, ndlr] et Ohne dich [Sacred mix, joué à l'orgue, ndlr].
Cette fois, ils voulaient quelque chose qui tienne plus de la réinterprétation. Ce n'était pas facile, parce que Mein Herz brennt est une chanson très énergique.
Ohne dich était une ballade. L'orgue d'église ne changeait pas réellement la personnalité de la chanson. D'ailleurs, au passage, c'était une expérience merveilleuse. Je n'étais autorisé à utiliser l'orgue qu'entre 1h et 5h du matin, en pleine nuit, et nous n'arrivions pas à trouver l'interrupteur pour allumer la lumière. Du coup, on a enregistré le morceau éclairés à la bougie ! C'était super !
Pour la version piano, j'ai juste imprimé les paroles de Mein Herz brennt et je les prenais avec moi partout ou j'allais. En les lisant, la texture de certains passages de piano m'est venue à l'esprit. J'ai juste eu à les sortir de ma tête et les coucher sur le papier.
- En tant que compositeur, quelles étaient les difficultés et les pièges à éviter pour réaliser une version piano d'une chanson aussi puissante que Mein Herz brennt ?
- Le piano ne peut pas être aussi puissant que les guitares de Rammstein. C'est pourquoi j'ai cherché une autre facette de la personnalité du narrateur de la chanson. Moins dangereuse, mais plus triste et calme. Je voulais enlever tous les aspects effrayants de la chanson pour vous faire ressentir toute la nostalgie et le désespoir de Till. Je pense que la vraie douleur est silencieuse. C'est pourquoi j'ai choisi de jouer la mélodie principale de manière aussi douce. De la douleur pure.
- Finalement, comment s'est déroulé l'enregistrement ? Le piano et la voix ont été enregistrés séparément ? Vous réalisez tous les deux une super performance !
- J'ai fait une maquette de ma version et le groupe l'a aimé exactement telle qu'elle était. Du coup, nous avons décidé de la garder et Till a du chanter par dessus. Till était intrigué par la musique et il a fait la bonne prise du premier coup. J'ai d'abord fait enregistrer la version piano par un autre musicien, parce que je pensais que mon jeu n'était pas assez bon.
Mais ensuite, Jacob Hellner, le producteur de Rammstein, m'a appelé et m'a dit on a perdu quelque chose avec cette version !
. C'est pourquoi au final, c'est moi que l'on entend sur le morceau. Je n'avais jamais joué de piano sur un enregistrement ou devant un public auparavant.
- Avec un peu de recul, êtes-vous personnellement satisfait de cette version piano ? Et le groupe, qu'en a t-il pensé ? Dans l'ensemble, les fans l'aiment beaucoup.
- Ce que le groupe pense de ce morceau est facile à voir. C'est vraiment rare de décider que le remix devienne le morceau principal ! Ils ont voulu faire une vidéo. C'est super ! Tout est dit.
- Vous avez probablement déjà vu la vidéo de Mein Herz brennt (Piano Version) filmée par Zoran Bihać. Elle est superbe, non ?
- C'est irrésistible. Je ne me lasse pas de Till dans cette vidéo. Je suis vraiment surpris de son impact émotionnel. J'en ai encore la chair de poule malgré tout ce travail.
- Aura t-on la chance de vous entendre à nouveau avec Rammstein ? Le groupe (à travers la voix de Paul Landers) a déjà évoqué la possibilité de travailler sur un album orchestral. Quelle est votre opinion sur un tel projet ?
- J'aimerais vraiment. Mais avec Rammstein, on ne sait jamais.
Si vous voulez en savoir plus sur Sven Helbig, vous pouvez vous rentre sur son site officiel et le suivre sur Facebook. Vous pouvez aussi entendre un extrait de son album solo Pocket Symphonies.
Interview réalisée par email en décembre 2012.
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